Le rire des déesses d’Ananda Devi / Grasset (2021)
Figure incontournable du paysage littéraire mauricien depuis de nombreuses années, Ananda Devi a sorti l’an dernier l’excellent Le rire des déesses. Connue pour son habilité à associer une écriture poétique à des sujets sombres et sérieux, l’auteure en a fait au fil du temps sa marque de fabrique. Le rire des déesses en est un nouvel exemple.
Direction une ville au Nord de l’Inde. Dans cette ville se trouve la Ruelle. Des prostituées y vivent. Méprisées par tous, ces femmes n’ont aucun droit. Parmi elles Veena qui a donné naissance à une fille qu’elle est incapable d’aimer. La petite Chinti n’a que dix ans. Si sa mère refuse de lui accorder une quelconque attention, ce sont les autres femmes de la Ruelle qui s’en chargent.
En plus de toutes ces femmes, Chinti est aussi la protégée de Sadhana, une de celles que l’on appelle les hijras, des femmes craintes et rejetées par la société pour être nées dans un corps d’homme. Un beau jour, l’équilibre fragile de la Ruelle est bouleversé. Chinti est enlevée par Shivnath, un prétendu homme de Dieu. Shivnath tente de faire croire à ses fidèles que Chinti n’est autre que la fille de la déesse Kali et qu’elle aurait le pouvoir de le rendre divin. Il l’a conduit donc dans sa demeure opulente avant de l’emmener avec lui en pèlerinage à Bénarès.
L’instinct maternel de Veena qui était enfoui jusqu’ici refait surface. Accompagnée des autres femmes de la Ruelle mais aussi des hijras, elle s’en va en guerre pour récupérer sa fille quitte à tuer Shivnath s’il le faut. Influencée par ses observations lors d’un séjour en Inde, Ananda Devi s’est intéressée au destin des enfants de prostituées dans ce pays. Dans ce roman choc, elle lève le voile sur l’hypocrisie qui règne autour des grands pèlerinages religieux en Inde. Un roman à la fois percutant et maîtrisé, un de plus dans le catalogue impressionnant de la native de Trois Boutiques.
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